08 novembre 2005

Pensées désordonnées.

J'ai bien dormie, j'étais éreintée cette nuit. Ce matin je me suis réveillée sans trop savoir où j'étais, j'avais dans la tête des pensées en anglais, espagnol et français, je me parlais à moi-même dans les trois langues, c'est bizarre mais c'est souvent comme ça quand je fais le voyage.
D'ailleurs je parle souvent en mélangeant les trois langues, selon ce que je veux dire je trouve plus facilement l'expression qui convient le mieux, c'est pratique pour moi et moins pour ceux qui ne comprennent pas les trois, mais bon, si j'ai a faire a un interlocuteur qui ne parle qu'une langue je fais quand même un effort.
Je ne sais pas pourquoi je raconte ça, j'avais pas du tout ça en tête en ouvrant mon ordi, c'est drôle comme l'esprit dérive parfois, on pense une chose et c'est l'autre qui prend le dessus.
Je voulais en fait raconter ma première journée, donc j'y viens.
Après une bonne douche pour me réveiller et me rafraîchir, j'ai pris ma voiture, dès le nez dehors, je retrouve la chaleur, les bruits, les odeurs qui caractérisent bien mon pays.
Ici je trouve que tout est coloré, que la vie est trépidante mais pas stressante. Je m'arrête au premier centre commercial où je dois me rendre et voila que je suis abordé par deux vendeurs des rues, c'est courrant ici. Un me propose kit piéton pour téléphone portable, pourquoi pas me dis-je. "Oui oui il me réponds, parce que los boletos (les contreventions) ont augmenté, elles sont passées à 25 dollars. Alors il vaut mieux avoir une oreillette. C'est un bon argument, comme en plus je ne veux pas rater un appel de mon chéri si je suis au volant, j'achète ladite oreillette. (Ici il est interdît de téléphoner en conduisant.)Voilà que l'autre me propose les DVD des derniers films à l'affiche, j'hésite, puis finalement je cède devant son insistance si aimable, "si mi amor, son buenos, veras que te vas a divertir mucho…"Je traduis, oui mon amour, ils sont supers, tu vas bien te régaler.
J'opte pour n'en prendre qu'un, je sais que c'est du piratage, et je n'aime pas participer à ça, mais je sais aussi que ces gens là n'ont pas tellement le choix pour gagner leur vie, ils se débrouillent comme ils peuvent. Je mets ma belle morale et mes convictions dans ma poche et j'achète. Je me dirige alors vers le magasin où j'ai décidé d'aller. Là encore je suis reçu avec les "mi amor, linda, corazon" etc... Ça fait du bien, surtout quand on a le cœur en peine. C'est ce que j'aime ici, les gens sont chaleureux, toujours souriants, pourtant la vie ne les épargne guère, la pauvreté est partout, la richesse aussi d'ailleurs, les deux contrastent terriblement mais vivent cote à cote sans aucun problème. La criminalité est bien moindre par rapport aux pays comme la France ou les états unis. Je me sens beaucoup plus en sécurité ici. L'image des pays comme celui-ci est bien souvent fausse outre atlantique. J'entends souvent lorsque je suis en France des répliques comme : Oh mais tu n'as pas peur de vivre là-bas, c'est un pays dangereux non ? Et bien non ce n'est pas un pays dangereux, pas plus qu'ailleurs, et je crois même que bien moins qu'ailleurs.
J'ai donc fait mes emplettes, j'ai pris mes rendez vous, et j'ai réservé mon billet d'avion pour aller jeudi matin sur mon île. Bien sur j'ai passé deux coup de fil à P, lui aussi, ça fait donc 4. (Le décalage horaire me permet encore de savoir conter jusqu'à 4.) Il me manque, ce n'est pas un scoop ok, mais c'est vrai, il me manque. Je me suis fait une raison, je me dis que je suis là pour faire ma part de préparatifs dans la préparation de notre voyage. Je vais donc m'occuper activement de l'achat du bateau, puis de la remise en état. Je vais me régaler à le remettre propre, le décorer, le faire beau. Notre prochain nid d'amour, le moyen de locomotion le plus lent, le plus cher, le plus inconfortable, dit-on dans le milieu de la voilà. Pour nous c'est le moyen le plus beau de voyager vers notre bonheur.
Cette première journée m'a aussi apporté quelques réflexions, sur ma vie d'aujourd'hui, et ma vie d'avant comme je dis, je veux dire ma vie d'avant P. Parfois on a la sensation d'avoir tout ce que l'on veut, plus que la sensation, la certitude, c'est ce que je pensais. Puis un cataclysme est venu briser ma vie. Le mot n'est pas trop fort, parce que c'est comme cela que je l'ai ressenti. Une crise de couple destructrice, elle m'est tombé sur la tête sans préavis. M'a mise à plat. Je croyais que jamais je ne verrai le bout du tunnel; j'avais du mal à me dire que c'est lorsque on touche le fond, qu'il ne reste plus qu'une chose à faire c'est de prendre l'élan et de remonter. Bien que je sois du genre optimiste, cet élan c'est le hasard du net qui me l'a donné. J'ai rencontré P, par pur hasard, sur un forum de psychologie ou il avait posté en réponse à quelqu'un qui vivait la même chose que lui. P, avait donné un conseil qu'il avait lui-même du mal à suivre. J'avais mi mon grain de sel, en lui écrivant que les choses n'étaient pas si simple qu'il voulait bien le dire. Sur ce il m'a répondu et nous avons échangé 8 mois et quelques centaines de mails, en toute amitié et solidarité. J'avais décidé de venir en France voir ma famille, je lui ai dit que peut être nous pourrions nous voir. C'est à ce moment que les choses ont changé de chapitre. Nos mails se sont transformés en scénario de rencontre éventuelle, nous riions beaucoup à l'époque, en plaisantant sur ce sujet, puis peu à peu, nous avions vraiment envie de nous voir, peur de nous voir, l'impatience de nous voir, la joie de nous voir…..jusqu'au jour ou nous avons eu le bonheur de nous voir. Déjà nous savions tout l'un de l'autre, oui tout, presque tout, si je devais dire un pourcentage je dirai 95 pour cent. Je connaissais plus P que mon ex mari, avec qui j'ai vécu 18 ans. Nous avions abordé une quantité de sujets innombrable. Nous avions exploré les moindres recoins de nos idées, valeurs, croyances, déceptions, frustrations. Ainsi que nos désirs, espoirs, attentes, rêves. Le plus fabuleux c'est que nous étions en phase. Je précise que ces échanges nous les avions alors que rien n'était "déclaré" entre nous, nous ne nous séduisions pas, et n'avions aucune intention de le faire, nous étions des amis, sans plus.
Je pense que c'est fabuleux de se connaître ainsi, dans le vrai, nous nous mettions à nus, sans pudeur, nous n'avions rien a perdre et une belle amitié à gagner. C'est fabuleux parce qu'il est rare de connaître quelqu'un sous ses plus sombres facettes, en général les sombres facettes on les découvre en temps de crise à deux. Le temps de la séduction entre deux personnes nous guide souvent à cacher les parts sombres de notre personnalité. Là c'était l'inverse, nous nous contions notre vie, en nous disant surtout nos réactions face aux aléas de celles-ci. Nous nous découvrions sous l'angle de la souffrance que nous vivions de part et d'autre. Nous nous épaulions mutuellement et l'écho de nos malheurs nous aidait à nous découvrir.
Nous n'avons presque rien découvert par la suite, si ce n'est le bonheur de vivre nos similitudes et nos complémentarités. Notre bonheur à partager nos moments ensemble. Nous en avons eu des difficiles aussi, surtout dus aux contingences extérieures, mais nous nous sommes battus, et nous continuons à le faire pour certaines choses qui nous restent à régler. L'important c'est de se battre pour atteindre le même but. Je crois que nous sommes sur la bonne voie.
Je viens de relire ce billet, j'ai dérivé du sujet que je voulais aborder, tant pis. Le décalage horaire à du me décaler les neurones. Demain je serai peut être plus claire, plus ordonnée dans mes pensées.